Je suis chasseur. Et alors ?
Qui va à la chasse gagne sa place dans le grand œuvre de la préservation de la nature.
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Depuis tout jeune, je suis dans la nature. Dans les années 1960-1970, on ne restait pas à la maison à regarder la télé ou internet. Autre temps, autres mœurs. On courait alors la campagne dans des parties de cowboys et d’indiens. En mars, il fallait trouver les premiers nids de merle, non pas pour les dénicher, mais pour prouver que l’on était plus malin qu’eux. Mon père m’avait appris à les respecter. Il fallait savoir faire la différence entre un nid de merle et de grive rien qu’à sa constitution et à la couleur des œufs ; distinguer le nid du troglodyte (ou béruchet, en gallo) de celui de la fauvette, avec ses deux entrées pour laisser ressortir sa longue queue, ou du chardonneret, petite boule de mousse tapissée de fleurs de chardon. Mais pas de pitié pour les moineaux qui pullulaient alors. Il fallait aussi savoir repérer un terrier de renard fréquenté par une famille et faire la différence avec un trou de blaireaux. Quand on trouvait des levrauts, interdiction d’y toucher sous peine d’abandon par sa mère. Observer un chevreuil était un privilège rare et les sangliers ne sortaient pas des grandes forêts. J’ai appris à fabriquer des frondes et des arcs avec des flèches en bambou. À 12 ans, mon père m’offrit une carabine à plombs au grand désespoir des moineaux et autres sansonnets. Tout naturellement, je passais mon permis de chasse en 1976. C’était le tout début d’un examen de type permis de conduire, avec des diapos et des réponses à choix multiples. Je suivais mon père, mon oncle et mon voisin, tous les trois chasseurs expérimentés, à la chasse au petit gibier. Aujourd’hui, plus de lapins ni de perdrix mais il faut réguler les corbeaux, chevreuils et sangliers, qui provoquent des dégâts dans les cultures. Le lièvre est en expansion.
J’ai suivi l’évolution de la faune au gré des transformations de l’agriculture. Les petits champs ceinturés de haies laissèrent la place à des parcelles plus grandes pour cultiver le maïs. L’hiver, sur la terre nue, nous déversions de grandes quantités de lisier en toute méconnaissance agronomique. Depuis plusieurs années, l’obligation de couverts végétaux a fait redécouvrir l’intérêt agronomique et écologique de ces cultures intermédiaires. Le gibier ne s’y trompe pas et profite de ces abris. Paradoxalement, les grandes surfaces d’herbes des systèmes bio ou très pâturants n’offrent que peu d’attrait l’hiver pour le gibier, sauf à avoir un réseau dense de haies et plantations.
Aujourd’hui, aller à la chasse, c’est s’exposer aux invectives, bras d’honneur et coups de klaxon d’une partie de la population qui vit en ville ou est revenue dans nos pays sans en connaître l’histoire et l’écosystème. Les agriculteurs sont controversés. Les forestiers ne peuvent plus abattre un arbre sans être accusés de détruire l’Amazonie. Dans le Finistère, une association regroupe les éleveurs, forestiers et chasseurs pour développer une synergie vertueuse. N’opposons pas la diversité dite remarquable (forêts, tourbières, parcs naturels) à notre diversité ordinaire. Nous avons besoin des deux pour construire un système que nous transmettrons à nos enfants.
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